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Pr Jacques Etame: « Nos universités doivent créer des entrepreneurs »

L’Institut universitaire de Technologie de Douala (IUT) a reçu plus de 3200 candidatures pour 600 places lors de son concours d’admission en première année de la formation initiale en juillet dernier. Occasion pour le Directeur de cette institution de revenir sur le rôle dévolu aux IUT et les mécanismes déployés par son établissement pour l’insertion professionnelle des étudiants.

Entretien mené par Armelle Sitchoma

La Covid-19 et la guerre en Ukraine ont amené un ensemble de pays et principalement les pays de l’Afrique sub-saharienne à s’interroger sur leur modèle économique. Certains Etats priorisent la production locale des éléments liés à la fabrication des produits de première nécessité. Au Cameroun, on parle de l’import-substitution. Quel rôle pourrait jouer l’université dans les problèmes sociétaux qui se présentent à nos économies?

L’université camerounaise ou le ministère de l’Enseignement Supérieur a eu pour mission de mettre à disposition un personnel de haute qualité susceptible de résoudre ces problèmes. Dans la SND30, le document de stratégie de développement du Cameroun pour les 10 prochaines années, l’accent est d’ailleurs mis sur le milieu éducatif et en l’occurrence sur la formation professionnelle.

Dans ce monde universitaire, quel est l’apport des établissements technologiques, notamment celui des IUT du Cameroun ?

Les IUT ne sont pas un concept camerounais. Les IUT sont un label dans les pays francophones. Ce sont des établissements particuliers dans le milieu francophone du monde, qui ont la charge de former des techniciens ou des cadres moyens et supérieurs directement utilisables par l’économie. Ainsi, les compétences obtenues dans ces établissements permettent aux étudiants de s’insérer directement dans le tissu économique du Cameroun.

LIRE AUSSI: Colloque IUT Douala: Pr Jacques Etame “La recherche doit être axée vers le développement du Cameroun” (VIDEO)

Quel est le positionnement des IUT du Cameroun ?

Le Cameroun a positionné ses IUT dans des bassins, des écosystèmes économiques. Dans l’écosystème sahélien qui regroupe les trois régions septentrionales du Cameroun, l’IUT de Ngaoundéré a été positionné avec des formations dans les métiers de l’agriculture et de l’agro-pastoral. Nous avons l’écosystème forestier avec un IUT à Mbalmayo. Il a pour spécificité la formation des techniciens dans les métiers du bois. Enfin, nous avons les IUT de l’écosystème côtier qui comprennent le College of technology de l’université de Buea et l’IUT de l’université de Douala. Les deux couvrent tout le bassin, l’écosystème qui part de Limbé jusque dans la zone de Kribi. On retrouve les techniciens supérieurs issus de ces écoles dans les environnements économiques proches des structures et ces IUT ont une relation très étroite avec le monde de l’entreprise.  De même, le mode d’enseignement est différent des modes facultaires et même des modes de certaines écoles des ingénieurs.

Les ingénieurs au Cameroun ne sont pas formés dans le même modèle que les IUT. Nous formons des ingénieurs généralistes. Le modèle utilisé le plus dans les IUT est celui de la pédagogie active et plus précisément de l’apprentissage par projet. C’est un modèle particulier que les Anglo-saxons utilisent le plus et qu’on appelle du Learn-by-doing. Ce modèle pédagogique particulier nous a permis aujourd’hui de faire savoir et de faire valoir les compétences de nos étudiants. Nous utilisons très souvent un slogan pour mieux exprimer cette démarche : La qualification d’abord, le diplôme ensuite.

Que devient finalement la masse d’étudiants formés dans les IUT quand le problème d’employabilité ne cesse de se poser avec acuité ?

La conjonction qu’il y a aujourd’hui entre les contingences du monde et la nécessité de formation a fait en sorte que les IUT sont devenus plus attractifs. Nous recevons des étudiants en masse. Les IUT ont été créés pour recevoir 400 à 600 personnes.  Ces chiffres ont été multipliés. Nous avons 6000 étudiants aujourd’hui à l’IUT de Douala. Vous comprenez que, même dans les IUT, certes nous réussissons à favoriser l’insertion professionnelle de nos étudiants, mais le tissu économique n’évolue pas avec l’intérêt des Camerounais à acquérir des savoirs et en l’occurrence des savoir-faire. La vitesse d’acquisition des savoirs, l’intérêt que les Camerounais portent aujourd’hui en matière d’éducation de leurs enfants, la population étant de plus en plus jeune, fait donc en sorte que le tissu économique ne puisse pas évoluer au même niveau.

 L’IUT de Douala: des étudiants prêts à l’emploi

Quels sont les mécanismes mis en place pour favoriser l’employabilité des étudiants de l’IUT ?

Nous avons aujourd’hui des problèmes qui commencent à se poser pour l’insertion professionnelle des étudiants. C’est fort de cela et étant prospectifs dans notre façon de travailler que nous avons créé des instruments avec des partenaires bilatéraux, en l’occurrence l’Agence universitaire de la Francophonie (AUF). La problématique de l’employabilité est une préoccupation qui tient à cœur toutes les universités dans ce réseau aujourd’hui. De nouveaux mécanismes sont donc mis en place avec des écosystèmes innovants. Dans le cadre de ce mécanisme-là, il a été mise en place à l’AUF, des centres d’employabilités francophone qui seront connectés partout dans le monde. Ces centres deviennent donc un label et le Cameroun a eu la chance de bénéficier de deux centres d’employabilité, avec un logé à l’université de Yaoundé II et l’autre à l’université de Douala.

Pourquoi ce Centre est-il logé à l’IUT de Douala ?

Quoi de mieux que le premier établissement supérieur du Cameroun qu’est l’IUT pour accueillir ce centre et servir de laboratoire à l’implémentation de ce mécanisme et le voir s’étendre à d’autres structures plus tard ? De plus, à l’IUT de Douala, ce centre vient trouver un cadre propice où plusieurs expériences ont déjà été engagées sur les questions d’employabilité. Ainsi, le centre d’employabilité est postérieur à la Plateforme de coopération universitaire-entreprise (PCUE) qui existait déjà. Il arrive également au même moment où nous mettions en place un laboratoire de référence dans les domaines du contrôle-qualité des aliments mais également de génie civil dans le contrôle des matériaux. Nous avons aujourd’hui autour de cette plateforme de coopération, des laboratoires de référence qui interagissent déjà avec le milieu professionnel et mieux encore, l’IUT va également recevoir dans quelques mois, le programme « Entreprendre » de l’AUF. C’est situé à l’IUT, mais c’est un écosystème qui doit servir tout le bassin universitaire de la côte.

IUT de Douala: les étudiants présentent leurs travaux de fin de formation

Vous êtes le président de la Commission régionale d’experts économiques et scientifiques, CREES, de l’AUF pour l’Afrique centrale et les Grands Lacs. Comment votre expérience va aider à la mise en place de ces mécanismes ?

Nous étudions depuis un bon moment les questions d’employabilité. La présidence de la Commission régionale des experts économiques et scientifiques participe donc à statuer sur les questions qui sont posées par les différentes universités. Dans ce mécanisme-là, nous avons la mise en commun des intelligences, la mise en commun des problématiques mais également la prise en compte des unités des patronats, notamment celui du réseau des patronats de l’Afrique centrale et des Grands Lacs. Nous discutions également aujourd’hui sur l’insertion professionnelle des jeunes qui doivent être des entrepreneurs de demain d’où le programme Entreprendre parce qu’il faudrait aujourd’hui que nos universités apprennent aussi à créer des entrepreneurs de demain car l’entreprise ne va pas au même rythme que la mise sur le marché des étudiants.

NDLR: L’examen pour la formation par alternance (cours du soir) 0 L’IUT a lieu le 4 octobre prochain et le concours d’admission en licence ce 19 septembre 2022. 

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