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Cameroun 1972-2022: Etat Unitaire an 50, illusion ou réalité?

“Entre la guerre évitable et inutile que nous vivons dans les régions anglophones, la montée du tribalisme érigé en système de gouvernance et l’inertie au sommet de l’Etat, il y’a du boulot”.

Par Theo Ngongang Ouandji*

Theo Ngongang Ouandji, urbaniste et auteur camerounais donne de temps en temps son point de vue sur les grands sujets d’actualité.

Pour beaucoup d’entre nous, la célébration du fameux 20 Mai, avec son cortège de défilés populaires des élèves et des corps de nos forces de défense, symbolisait cette « Unification » scellée le 20 mai de l’année 1972 et célébrée sur toute l’étendue du territoire. On assistait alors à ’avènement de la République Unie du Cameroun! (avec la fameuse étoile trônant désormais au centre de notre drapeau, remplaçant les deux autres).

50 années se sont écoulées depuis cette date gravée de manière presque indélébile dans nos mémoires et nos esprits, et aujourd’hui, je me demande ce qu’elle représente pour les plus jeunes, ayant grandi dans un pays qui ne ressemble plus vraiment à celui qui nous a bercé!

A titre de rappel, cette date depuis lors marque la célébration de notre fête nationale (autre fois fêtée le 1er Janvier) même si dans plusieurs autres pays, on célèbre plutôt le jour de l’indépendance comme fête nationale (pour les pays qui se sont battus pour l’obtenir). En effet, au Cameroun, tous ceux-là, ces héros de notre lutte à nous, ont été lâchement assassinés et présentés comme des ennemis de la république. Le grand Général, pourtant libérateur de sa nation et précurseur de la 5ème république française, s’était alors contenté de nous « cadeauter » notre pseudo indépendance et nous avons applaudi comme des moutons…Mais c’était juste un rappel, revenons à notre 20 mai!

Donc, comment est-on arrivé à ce 20 Mai en 72? (Je laisse notre CAN de la même année de côté car il y a des souvenirs qui font mal…)

Rappel historique

Un rapide survol de notre histoire politique de l’époque nous révèle les dates et faits marquants suivants:
-1960: Indépendance de notre territoire jusque là sous tutelles Française et Britannique
-1961: Réunification/création d’une république Fédérale avec un État Occidental (Anglophone) et un Oriental (Francophone)
-1966: Abolition du multipartisme et création d’un véritable parti-état (unique) avec comme socle l’Union Camerounaise et autour plusieurs partis l’ayant ralliée..
-1971: Assassinat du dernier « dissident », opposant, leader du dernier parti nationaliste du Camer
-1972: Référendum Constitutionnel sur la nécessité ou non de créer une République « Unie » en absorbant les deux états fédérés, le 20 Mai et approbation de « l’Unification » de l’Etat qui de facto faisait de notre pays une nation à deux vitesses: d’une part gérée et dominée politiquement par des francophones et d’autre part imposant à l’ancien Cameroun Anglophone ses lois et ses coutumes y compris le parlé de la langue de Molière…La plupart des fonctionnaires Anglophones parlaient alors cette langue mais leurs confrères francophones comprenaient à peine celle de Shakespeare, n’ayant aucune raison de le faire anyway…

Je m’arrêterai là pour ce qui est des rappels historiques teintées de mon analyse sucrée (comme la récente CAN) de la situation de cette jeune nation à l’époque! Mais je ne m’enfuirais pas sans poser ma part de questions:
-Avons-nous gagné ou perdu en termes de l’unité rêvée (ou de fait) entre nous citoyens de ce “Mboa” que nous aimons tous?
-Que retenons-nous de cette décision et surtout de cette période tumultueuse de notre histoire? Quel est le bilan 50 ans après?
-Sommes-nous vraiment (encore) unis aujourd’hui?

Crise anglophone et tribalisme, de vraies menaces pour l’unité

Les raisons d’être sceptique sont nombreuses.

  • La guerre évitable et inutile que nous vivons dans les provinces Anglophone.
  • La montée du tribalisme érigé en système de gouvernance et du réflexe du repli identitaire.
  • L’inertie au sommet et les rivalités liées aux guerres de repositionnement:
  • La déliquescence des mœurs et la montée de l’insécurité(associée à mon sens à l’enrichissement subit d’une poignée de citoyens au détriment de la majorité qui elle s’appauvrit devant nos yeux).
  • L’eau potable ou l’électricité qui demeurent des raretés (oui je sais, les riches ont les forages et les groupes électrogènes, qui est fou?).
  • Les crimes rituels et autres assassinats non élucidés (la mort est devenue banale).
  • Les envolées virtuelles de nos influenceuses sur la toile.
  • Les immeubles qui poussent à tous les carrefours sans réelle prise en compte des règlements d’urbanisme et autres plans d’occupation du sol ou même ceux qui s’écroulent car bâtis dans des zones inconstructibles ou sans réel calcul de structures préalable.
  • Les routes qui continuent de tuer et les hôpitaux qui les aident dans ce sens.
  • Les expropriations foncières à tout vent.
  • Les écoles publiques qui offrent des spectacles dignes de films d’adultes.

Tous ces maux qui minent notre société n’ont certainement pas tous leurs origines associées au 20 mai, (je profite juste de l’occasion d’avoir votre attention ?) mais entre nous le 20 Mai-là , ça nous avance encore à quoi? On fête quoi? Bon on construit un monument pour ça alors quand? En tous cas, on est ensemble! Mais il y a du boulot…

NDLR: Les intertitres sont de la rédaction.

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