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Artisanat : le rotin, tout un mode de vie

De la liane brute aux meubles raffinés et objets de décoration, cette matière naturelle aux multiples usages, est façonnée avec soin par les artisans de Ndogbat à Douala.

Sur la rue principale du lieu-dit Ndogbat vers le Carrefour Agip, dans la ville de Douala, les ateliers de vannerie forment un tableau vivant. Dans des petits espaces, les artisans s’affairent à transformer le rotin brut en meubles, objets de décoration et bien d’autres créations. Le rotin, apprécié pour sa légèreté, son originalité et son authenticité connaît un regain d’intérêt. Très prisé dans les foyers modernes, il rivalise avec le bois et d’autres matériaux souvent plus coûteux.

Un traitement minutieux

À première vue, fabriquer un meuble en rotin semble simple. Mais comme l’expliquent les artisans rencontrés, le rotin brut est une liane grise pouvant atteindre 200 mètres. Il nécessite un traitement minutieux avant de devenir un produit fini. Après la coupe en brousse, les lianes arrivent en rouleaux dans les ateliers.

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Là, les artisans les nettoient, les sèchent et, selon l’objet à réaliser, conçoivent d’abord un cadre avant de tisser patiemment. « Je me suis lancée dans l’artisanat après avoir vendu des bananes sans succès ; aujourd’hui, je fabrique jusqu’à six paniers par jour », raconte Charlotte Siewe, artisane depuis un an. « Les prix varient en fonction de la taille ; c’est à partir de 1 500 Fcfa pour les petits modèles et 5 000 Fcfa pour les grands ; le prix fixe, c’est le mannequin, vendu à 1 500 Fcfa », rajoute-t-elle.

De la matière première au produit final

Rostand Kane Towa, un artisan trouvé en plein travail, détaille à Télé’Asu les différentes étapes de fabrication. « Le rotin utilisé ici vient d’Édéa, dans la région du Littoral ; lorsqu’il arrive, nous le nettoyons, le séchons et le préparons selon les modèles à fabriquer », explique-t-il. Ces ouvriers de Ndogbat font preuve d’ingéniosité à transformer une matière brute en œuvres élégantes et fonctionnelles.

La transformation du rotin

 

Sur place, Éric Leudjeuh, exerçant ce métier depuis 30 ans, clarifie la différence qui existe entre les lianes utilisées, bien qu’elle ne soit pas très visible. « Nous utilisons deux types de lianes ; les souples, pour les attaches, et les plus rigides, pour recouvrir les cadres », laisse-t-il entendre avant de rajouter « nous fabriquons tout ; des chaises, des armoires, des lits, des berceaux, des lustres et même des mannequins ». En ce qui concerne les prix, il explique que ceux-ci varient selon la complexité de l’œuvre et les préférences des clients. « Un salon peut coûter en moyenne 70 000 Fcfa et certains modèles très élaborés montent jusqu’à 400 000 Fcfa », fait-il savoir.

Objet de décoration

 

En ce qui concerne la durée de fabrication des objets, selon les ouvriers, une fois la matière première sur place, cela peut prendre entre trois jours et un mois, dépendamment du modèle à concevoir. Les salons et paniers en rotin restent les articles les plus demandés, bien que les lits, vases et lustres trouvent aussi leur clientèle.

Les challenges sont nombreux

Malgré leur savoir-faire, ces artisans font face à plusieurs obstacles. Éric Leudjeuh souligne notamment l’impact des services des eaux et forêts, qui compliquent la tâche aux fournisseurs dès la sortie de la brousse. « Nous avons beaucoup de difficultés avec les eaux et forêts qui gênent nos fournisseurs, puis viennent les policiers et les routiers, ce qui fait augmenter le coût de la matière première », confie l’artisan. Une situation qui rend l’approvisionnement en rotin plus coûteux une fois arrivé en ville.

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Les artisans regrettent également l’absence de subventions, malgré les promesses des autorités. « L’État ne nous subventionne pas, alors que le chef de l’État avait promis de soutenir ceux qui sont entreprenants ; mais malheureusement, notre ministère de tutelle n’envoie personne sur le terrain pour nous sensibiliser ou nous guider sur comment obtenir de l’aide ; on nous a abandonnés », déplore Éric Leudjeuh. Les artisans de Ndogbat doivent aussi surmonter des défis liés à la réglementation.

Une source de revenus

Malgré ces difficultés, les artisans restent optimistes et encouragent la jeunesse à se lancer dans l’artisanat pour trouver une voie de subsistance. « Certes, il n’y a pas beaucoup de travail dans le pays, mais même dans l’artisanat, on peut réussir ; cela fait 30 ans que je vis de ce métier ; je nourris ma famille et je paie les études de mes enfants grâce à ça », confie Éric Leudjeuh. Il invite les jeunes à ne pas risquer leur vie en cherchant fortune ailleurs, mais à venir apprendre un métier accessible.

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