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Recyclage : la seconde vie des pneus usés

Au lieu-dit Camp Yabassi, dans le deuxième arrondissement de Douala, des artisans s’attellent à transformer les roues endommagées des engins lourds en différentes pièces pour les voitures et motos.

Assis le long de la ruelle qui mène au marché Nkololoun, dans le deuxième arrondissement de Douala, des hommes âgés de 15 à 65 ans redonnent une seconde vie aux roues endommagées des engins lourds. En allant à leur rencontre pour en savoir plus, ces hommes révèlent à Télé’Asu que plusieurs raisons les ont poussés à exercer ce métier. « L’idée nous est venue de nos parents qui coupaient et utilisaient le caoutchouc pour attacher les chèvres. Nous avons ensuite tenté de le transformer pour en faire des objets utiles ; cela fait 40 ans que je suis dans ce domaine et j’ai formé de nombreux jeunes ; certains travaillent ici, d’autres à l’étranger », explique Paul Djou.

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Comme lui, pour certains artisans, cette activité est un héritage familial. « Nos grands-parents sont allés au Nigeria pour vendre du tabac et ont vu comment les Nigérians utilisaient le caoutchouc pour fabriquer des chaussures, tandis qu’au village, les enfants marchaient pieds nus. Ils ont alors décidé d’apprendre et de revenir au village pour en faire leur activité. Voilà comment j’ai suivi leurs pas et maintenant, je fabrique des objets en caoutchouc », explique Flobert Fodzah. Le recyclage du caoutchouc est également perçu comme une réponse au chômage qui touche de nombreux jeunes. « C’est le chômage qui nous a poussés à nous lancer dans ce métier ; nous devons nous débrouiller pour survivre ; ici, personne ne rentre chez soi sans avoir gagné quelque chose », précise Patrice Mbang.

Un travail de précision

Bien que ce soit un travail effectué avec des outils rudimentaires comme le couteau, ces ouvriers confient à Télé’Asu qu’il faut beaucoup d’attention et de précision pour obtenir un produit fini qui respecte les consignes et le résultat final que souhaite le client. « On utilise la machine à limer pour limer le couteau et, à son tour, le couteau, qui est notre principal outil de travail, nous permet de donner la forme à la pièce espérée », confie André Fofou.

La nouvelle vie des pneus

 

Pour couper facilement ces roues et obtenir la forme souhaitée, ils trempent régulièrement leurs couteaux dans de l’eau contenant du détergent. Avec le temps, ces ouvriers ont modernisé leur travail afin d’attirer plus de consommateurs et de l’adapter selon les besoins du marché. « Nous avons modernisé l’activité pour l’adapter aux pièces automobiles et autres objets en caoutchouc », ajoute Flobert Fodzah.

Le Camp Yabassi

 

Les matières premières proviennent des grandes entreprises et des sociétés industrielles qui utilisent des engins lourds comme les Caterpillars. « Nous n’utilisons pas les pneus contenant du fer à l’intérieur, car ils sont plus difficiles à travailler », affirme André Fofou. Toutefois, ces artisans confient à Télé’Asu que l’accès aux matières premières est devenu un véritable défi. « Avant, le matériel ne coûtait pas cher, mais aujourd’hui, nos fournisseurs doivent payer des millions pour récupérer les déchets en caoutchouc dans les entreprises. Cela rend nos coûts de production plus élevés », souligne Patrice Mbang.

Les outils fabriqués

Pour les voitures, ces artisans conçoivent des supports moteur qui absorbent les vibrations, des joints d’étanchéité pour éviter les fuites, ainsi que des boudins de suspension et des silent blocs pour amortir les chocs. Ils produisent aussi des couvre-poussières, des soufflets, des semelles d’amortisseur, des courroies, des tampons de butée et des durites pour la circulation des fluides.

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Pour les motos, ils fabriquent des semelles de repose-pieds, des poignées de guidon, des supports de réservoir et des tampons anti-chocs. Ils produisent aussi des bagues en caoutchouc pour les suspensions et des carters de protection pour le moteur.En plus des pièces automobiles, ces artisans réalisent aussi des chaussures en caoutchouc largement utilisées dans certaines régions.

Appel à l’aide des autorités

Pour ces artisans, le soutien des autorités pourrait faire toute la différence. Paul Djou plaide pour un espace de travail aménagé par le gouvernement. « Sans nous, beaucoup de voitures importées ne pourraient pas être réparées localement ; nous fabriquons et rénovons des pièces essentielles. Le gouvernement devrait nous aider à obtenir un espace de travail adapté », dit-il.

Le recyclage des pneus

 

Malgré les difficultés, ces artisans ont su se faire un nom au-delà des frontières camerounaises. Leur expertise est sollicitée jusqu’au Gabon, et leur capacité à reproduire des pièces rares en fait des acteurs clés du marché de la réparation automobile. « Il y a des clients qui viennent commander les articles ici pour aller avec au Gabon et au Nigéria », indique Paul Djou. Dans un contexte où le recyclage et la valorisation des déchets sont de plus en plus encouragés, ces artisans démontrent que l’économie circulaire peut être une réponse efficace aux défis du chômage et du développement durable.

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