Affaire Martinez Zogo: dans l’attente du procès
L’ordonnance de renvoi qui met fin à l’information judiciaire a été rendu public ce 29 février 2024. Tous les regards sont désormais tournés vers le tribunal militaire pour l’étape de jugement des 17 accusés concernés.
C’est par un document de 20 pages que le Colonel magistrat Pierrot Narcisse NZIE nommé juge d’instruction au tribunal militaire le 18 décembre dernier a clôturé son enquête dans l’affaire Martinez ZOGO.
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Comment chacun des accusés est arrivé dans l’affaire
Dans ce document, le Colonel magistrat Pierrot Narcisse NZIE explique comment chacune des dix sept personnes accusées sont impliquées. D’entrée de jeu, le juge fait avoir que c’est au lendemain de la découverte des restes de Martinez ZOGO qu’une dénonciation a été faite au groupement de gendarmerie territoriale de Yaoundé indiquant que quelques jours avant, Justin DANWE de la DGRE recherchait des gros bras pour une action contre l’homme de média.
On apprend ainsi que Martinez ZOGO a été suivi entre le 06 et le 17 janvier 2023 par trois agents de la Direction générale de la recherche extérieure. LAMFU Johnson NGAM, TONGUE NANA Stephane et DAOUDA. Les agents EBO’O Clément, Lenoir DAWA Bosco, BAKAÏWE Sylvain et GODJE OUMAROU Vincent ont ainsi procédé à son enlèvement tandis que NZOCKMEPING Martial assurait la couverture pour que tout se passe bien. Le juge d’instruction note ensuite que ceux qui ont enlevé et torturé Martinez ZOGO ont tous déclaré dans un premier temps qu’ils l‘ont bel et bien laissé vivant peu avant 22H sauf que les données de localisation ont permis de découvrir que deux agents (LAMFU et DAOUDA) étaient retournés sur les lieux pour finir le travail en ôtant la vie à Martinez ZOGO sous la coordination, fait savoir le juge, de Justin DANWE et de Martin SAVOM.
Quant au fameux véhicule PRADO utilisé, il a été fourni par un certain ENGWELE NGWELE Etienne présenté comme un opérateur économique. Le commissaire de police SAÏWANG Yves et un officier de police HEUDJI Guy Serge tous de la DGRE sont accusés d’avoir aidé à tracer Martinez ZOGO. L’entrée en scène du faux capitaine Arthur ESSOMBA qui va se révéler être en réalité un agent de la DGRE intervient le soir de l’enlèvement. C’est lui qui appelle Martinez ZOGO et dit vouloir lui remettre des documents compromettants sur certaines personnalités.
En ce qui concerne le célèbre maire Martin SAVOM, le juge d’instruction fait avoir que la nuit de son enlèvement, Martinez Zogo l’a appelé. Pour Bruno BIDJANG, quelque temps avant l’enlèvement, il a promis des représailles à Martinez ZOGO en disant à son contact Paul Daisy BIYA que le moment venu, ils seront « sans pitié » pour Martinez ZOGO.
Ce que les enquêtes ont révélé sur les principaux accusés
Le cas EKO EKO, le juge d’instruction fait savoir que l’ancien patron de la DGRE a nié les faits de complicité de torture. Le juge, qui n’y croit pas, d’ajouter que le matériel utilisé (voiture et armement) était de la DGRE et que la reunion préparatoire s’est faite dans la salle de crise de la DGRE dans laquelle ne se déroule que les opérations ordonnées par le DGRE lui-même d’après un témoin. Autre curiosité relève le juge d’instruction, alors que EKO EKO fait savoir que Martinez ZOGO ne représentait pas une menace pour lui, il a ordonné la surveillance du chef de chaine de Amplitude FM par la DGRE dans le cadre du dossier “PRESSE” qu’il a crée en 2015, confiant même la cible ZOGO à un agent de la DGRE.
Jean Pierre AMOUGOU BELINGA lui aussi a tout réfuté et a soutenu que l’argent remis à DANWE c’était juste un dépannage et non une avance pour s’en prendre à Martinez ZOGO. Sauf que, fait savoir le juge, DANWE persiste en disant que lors de leur rencontre le 29 décembre 2022, le patron du groupe l’Anecdote lui a remis la somme de deux (2) millions « pour faire taire Martinez Zogo qui l’insulte » Plus tard, fait savoir le Colonel NZIE, DANWE va parler “d’intimider” et on plus de “faire taire” mais reste ferme sur l’idée de mener une action forte contre Martinez ZOGO. Et plus encore, les images de surveillance de l’immeuble EKANG montre que DANWE est allé voir le patron du groupe l’Anecdote la veille de l’enlèvement de Martinez ZOGO, le 16 janvier pour le rassurer et le lendemain de sa disparition le 18 janvier pour lui faire le compte rendu.
MARTIN SAVOM Il a lui aussi tout nié en bloc disant qu’il se trouvait à BIBEY ce jour-là et que son seul lien avec Justin DANWE est que l’officier supérieur de a DGRE est le patron de sa femme. Là encore les enquêtes révèlent que les données de géolocalisation vont montrer que Martin SAVOM est parti de BIBEY la nuit du 16 au 17 janvier et vont le signaler à Awae Ewankang vers minuit. Plus encore, le 17, jour de l’enlèvement de Martinez ZOGO, dans l’après-midi et d’après les données de géolocalisation, Martin SAVOM s‘est retrouvé à la voirie municipale avec Justin DANWE. Pour finir le juge fait savoir que la nuit de l’enlèvement de Martinez Zogo, Martin SAVOM a retiré de l’argent dans un guichet automatique et cette même nuit, Justin DANWE a en distribué à ses agents.
BRUNO BIDJANG a fait savoir pour sa défense que l’expression « on sera sans pitié pour lui » n’avait rien à voir avec une quelconque agression physique mais concernait plutôt la machine judiciaire qui allait être déployée contre Martinez Zogo. Une version à laquelle le juge ne croit pas.
Les chefs d’accusations retenus
Au final on retiendra que trois accusés vont répondre des chefs de “complicité d’arrestation et séquestration, complicité de torture, d’assassinat et violation de consigne” notamment LAMFU Johnson, TONGUE NANA Stéphane et DAOUDA. Justin DANWE est poursuivi pour “complicité d’assassinat, complicité d’arrestation, complicité de torture et violation des consigne”. Martin SAVOM écope des chefs d’accusation de “complicité d’assassinat et complicité de torture”.
Quant à Jean Pierre AMOUGOU BELINGA, Maxime EKO EKO, ENGWELE NGWELE à qui appartenait le PRADO et deux agents de la DGRE SAÏWANG Yves et HEUDJI Guy Serge qui ont aidé à localiser le véhicule de Martinez ZOGO, ils sont poursuivis pour complicité de torture. Bruno Bidjang répondra de l’accusation de “conspiration de torture, d’arrestation et séquestration”. L’agent de la DGRE BIDZONGO MBEDE Albert sera poursuivi pour “complicité de torture, usurpation de titre et usurpations de fonctions”. NZOCKMEPING Martial va répondre des chefs de “violation de consigne, coaction d’arrestation et séquestration, complicité de torture”. Quatre agents de la DGRE notamment EBO’O Clément, Lenoir DAWA Bosco, BAKAÏWE Sylvain et GODJE OUMAROU Vincent seront poursuivis pour “violation de consigne, coaction d’arrestation et séquestration et coaction de torture”.
Reste à présent l’ouverture du procès.
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