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Francis Ngannou: “Je fais désormais partie du Top 10 des boxeurs de la Wbc”

Moins de 3 semaines après son combat de boxe du 28 octobre à Riyad face à Tyson Fury, Francis Ngannou revient sur cette soirée. A cœur ouvert, il nous promène dans les préparatifs de ce combat, ses entrainements, son avenir dans la boxe et son état d’esprit avant et pendant ce combat.

Propos réaccueillis par Blaise DJOUOKEP

Un peu plus de deux semaines après votre combat à Riyad en Arabie Saoudite contre Tyson Fury, comment vous sentez-vous ?

Pour être honnête, je suis fatigué. Je veux juste partager cette expérience que j’ai vécue, parce que c’était une grosse expérience. C’était une grande première pour moi. Mais, au final, ce n’était pas mal comme expérience, parce que le parcours qui nous a conduit là fut assez impressionnant. Partir d’un sport pour un autre et réussir à faire ce que j’ai fait est impressionnant. Surtout que personne ne vendait chère ma peau.

Comment vous êtes vous senti lorsque toutes les statistiques et quasiment tous les paris étaient contre vous ?

Ils oubliaient d’où je viens, parce que, je leur avais dit que, même si je ne connais pas la boxe, les gars respectez-moi, c’est la bagarre. (éclats de rire). Que ce soit la boxe ou le combat, c’est la bagarre. Surtout que j’avais mon honneur à défendre. Et j’ai toujours eu cette métaphore que j’aime bien. “Faites attention à un homme qui se bat pour une raison”. Vous pouvez attaquer un homme en route, il va fuir. Mais, trouvez-le chez lui et en prenez-vous à sa famille, vous vous rendrez compte qu’il est beaucoup plus fort que vous ne l’avez imaginé. Et lui-même va se découvrir parce qu’en ce moment, il se battra pour une raison.

On échoue généralement parce qu’on n’identifie pas la raison pour laquelle on se bat. On se bat juste pour se battre, sans objectif.

On échoue généralement parce qu’on n’identifie pas la raison pour laquelle on se bat. On se bat juste pour se battre, sans objectif. Et on s’épuise sans toutefois atteindre nos objectifs. Quand notre combat a un objectif, cela nous permet d’avoir une feuille de route et de se battre pour réaliser cette feuille de route.

C’était pratiquement un combat perdu d’avance. Qu’est-ce qui vous a motivé pendant votre préparation ?

Toutes ces statistiques en ma défaveur l’ont plutôt motivé. C’est vrai que moi-même, je me demandais comment je vais faire pour combattre quelqu’un qui a fait la boxe toute sa vie. Surtout que les pronostics ne me donnaient pas gagnant, même dans mon cahier (rire). C’est vrai que c’était la bagarre. Mais, je me suis donné les moyens de la remporter. J’ai fait ce que je devais faire. Je me suis dit, si cela ne me sourit pas, au moins j’aurais tout donné. Je ne suis pas allé à Riyad ce jour-là dans l’intention de gagner uniquement. Je ne me suis pas focalisé sur la victoire. Je me suis concentré sur le combat. Il fallait tout donner pendant les entrainements. Et ce fut de loin un de mes entrainements les plus difficiles. Je savais que j’avais un obstacle en face de moi qui partait avec des avantages, et donc, je redoublais d’efforts quand il le fallait.

A plusieurs reprises, on a arrêté les entrainements. Pendant que je m’apprête pour rentrer chez moi, je pense au combat, à Tyson Fury, à cette soirée au courant de laquelle je ne voulais pas du tout me ridiculiser, je demandais aux gars qu’on reprenne les entrainements. Ils me disaient, non on a fini. Et à moi de dire qu’on n’a pas fini. C’est moi qui serais sur le ring en train d’esquiver ou d’encaisser les coups de Tyson Fury, vous serez derrière. (fou-rire). Et on travaillait encore et encore parfois pendant plus de 30 min.

Ngannou et Fury le 28 octobre à Ryad

Je rentrais chez moi et je réfléchissais au combat. Je me demandais, comment en sommes-nous arrivés-là. La vérité c’est que j’ai réclamé ce combat pendant 4 ans. Et maintenant qu’on me l’a donné, je me posais de tonnes de questions. Je me demandais surtout si je dois en profiter pour faire de ce combat une réussite. Et j’ai donc redoublé d’efforts, surtout sachant d’où je viens. Et pour me motiver, je me dis souvent que la seule chose que j’ai à faire c’est de m’entrainer dur. Certes, ce n’est pas facile. Mais, c’est la seule chose que j’ai à faire. M’entraîner et me concentrer sur une seule chose, la bagarre (rire).

La présence de Mike Tyson, ancien champion du monde poids lourd de boxe, à vos coté, vous a-t-elle motivé ?

Mike Tyson a toujours été mon idole depuis mon enfance. Et donc, que ce soit lui qui soit là à mes cotés, et qui croit en moi, dans mon premier combat officiel de boxe, dans un combat où on ne me donne pas l’ombre d’une chance de gagner, cela m’a beaucoup motivé. C’est une preuve de confiance qui a renouvelé la mienne en moi. Il intervenait juste à mon entrainement. Il y est venu trois fois, ce n’était pas mon entraineur principal.

Est-ce possible qu’il y ait un combat retour ?

Laissez-moi vous dire qu’il y a une possibilité de revanche à ce combat. Il n’y aurait jamais eu cette possibilité si je m’étais ridiculisé cette nuit-là à Riyad. Pendant 4 mois, j’ai dû faire ce que j’avais à faire pour arriver là.

Au terme de ce combat, deux juges sur les trois ont attribué la victoire à votre adversaire. Comment avez-vous apprécié cette décision ?

D’aucuns diraient que les juges n’ont pas été justes dans leur décision. Mais, moi je ne leur en veux pas du tout. On leur a tout pris. Et c’est normal qu’ils s’accrochent sur le peu qu’il leur reste. Ils n’ont jamais vendu ma peau chère. Que ce soit pour ce combat ou à l’Ufc. C’est parce qu’ils se fient beaucoup aux papiers, aux statistiques. Ce ne sont pas les statistiques qui combattent. C’est chacun qui écrit ses statistiques. Chacun a son destin. Et on ne saura jamais si on va déjouer les statistiques, si on n’essaie pas

Dans quel état d’esprit étiez-vous ce jour-là, pendant la préparation du combat, le jour du combat et pendant le combat ?

Lors de la préparation du combat, j’avais des sueurs froides pendant mes nuits. Je faisais tout pour avoir le moral haut. Et certains m’ont dit après le combat qu’ils étaient surpris que le jour du combat, c’était comme si je n’avais pas un combat, parce que j’étais détendu. Et je me disais intérieurement, ’’si seulement ces gars ci savaient ce qu’il y avait dans mon cœur ce jour-là’’.

Ngannou de retour au Cameroun quelques jours après son combat

Et je leur répondais : on va me mettre dans le ring avec un champion du monde, quelqu’un qui fait de la boxe depuis son enfance, et moi qui suis là pour la première fois, ne sachant même pas comment cela se passe, un combat de 10 round. Je n’ai jamais fait un combat de 10 rounds, même pas 4 rounds. Je me demandais comment je vais faire pour arriver au bout de ces 10 rounds. Je combattais mes propres démons. Mais, je croyais en mes entraînements, au travail que j’avais abattu au préalable. C’est en cela que je misais ma confiance en ces entraînements. Et je me rassurais que je m’entrainais plus que la normale, et donc, plus que lui.

Comment Tyson Fury-a-t-il d’après vous, perçu ce combat ?

Le problème était qu’il était un peu confortable. Il avait à faire à un novice. Il n’avait pas compris la théorie du danger. Il a cru ne pas être en danger, et c’est à ce moment qu’il s’est mis en danger. De l’autre côté, je savais que j’étais en danger, parce que je jouais dans sa cour.

Quel était votre challenge pendant ce combat ?

Je suis sorti de ce combat en tant qu’in boxeur confirmé. J’ai déjoué leurs statistiques. J’ai battu leur champion. Et pendant le combat, à tous les rounds, je pensais au 10ème round. Il fallait que j’arrive au 10ème round. Je me suis certes entrainé très dure. Mais, je n’avais pas d’expérience. Et donc, j’avais des doutes en moi. Il ne fallait pas que je m’épuise avant la fin. Il ne fallait pas que j’accélère trop.et donc, je devais gérer tout ce timing. Et j’ai trouvé une formule qui marche. J’ai appris quelques points techniques de mon adversaire pendant ce combat.

Qu’avez-vous appris pendant ce combat ?

Tyson Fury était très inconfortable quand je changeais de garde. D’habitude, c’est lui qui mène le jeu en changeant de garde pour déstabiliser l’adversaire. Et quand j’ai changé de garde pour la première fois, il a fait pareil. Mais, j’étais plus confortable que lui dans ce changement de garde. Il était très inconfortable. Je pouvais le voir s’interroger sur ce qu’il fait maintenant. Il avait des doutes sur ce qu’il devait faire. Et je pense que c’est ce qui m’a permis d’arriver au 10ème round. Parce que quand j’étais un peu fatigué, je changeais de garde, et lui il arrêtait d’avancer, de mettre la pression, jusqu’à ce que je récupère. Et quand je change de garde pour revenir à droitier, le combat reprenait de plus bel, parce que j’étais prêt.

Ce sont de petites choses qu’on découvre et apprend pendant le combat. Ceux qui ne sont pas sur le ring ne voient pas ça. J’ai quand même une petite expérience en boxe, même si c’est avec un seul combat. Et j’espère que cela va m’aider pour les prochains combats. Donc, je gérais le combat pour arriver au 10ème round. C’est pourquoi, au 8ème round, lorsqu’il était touché, je n’ai pas trop accéléré parce que je savais qu’il restait deux rounds. J’ai baissé en intensité au 9ème round et au 10ème, je me suis rendu compte que j’avais encore un peu d’énergie. Et j’étais sure qu’on devait finir le combat. Donc, je peux désormais faire 10 rounds et pourquoi pas 12 rounds, pour un éventuel championnat du monde, si cela s’avère nécessaire.

Vous attendiez-vous à l’ampleur que ce combat a pris quand vous avez signé pour ce challenge ?

Honnêtement, je n’avais pas du tout idée de l’ampleur que devait prendre ce combat. Je réalise cela 3 mois avant le combat, lors qu’on me demande d’aller faire les vidéos de promotion du combat. D’habitude, on les fait deux semaines avant. Et cette vidéo de combat a été faite à Hollywood. Je commence alors à comprendre que c’est la crème de la crème, avec ma statuette sur le London bridge. Un clip a été fait spécialement pour ce combat. Les musiciens n’étaient que des intervenants. L’organisateur du combat a acheté tous les droits. Ils nous ont valorisés. On a été bien respecté. Ils ont fait que ce combat nous mette en avant. Ils l’ont fait de façon équitable.

Quel est le regard que la fédération de Boxe porte désormais sur vous après de combat ?

Nous sommes allés à Riyad pour écrire l’histoire. Pour défier les statistiques. Aujourd’hui, leur fédération de boxe et la communauté de boxe accepte que je suis un boxeur. Et ils ont décidé de me classer. J’ai vu le président de la Wbc, qui a dit que je devrais être introduit dans le top 10 de la boxe anglaise parce que, dit-il, c’était impressionnant de voir quelqu’un avec une mâchoire solide et qui savait boxer.

C’était une belle expérience et je remercie tous les camerounais, tous les africains qui m’ont soutenu et qui ont cru en moi.

C’était une belle expérience et je remercie tous les camerounais, tous les africains qui m’ont soutenu et qui ont cru en moi. Cela m’a beaucoup motivé. Maintenant, il y a le re-match. Et au re-match, on va redoubler d’efforts. Ce combat nous a permis de prendre conscience qu’on peut le faire.

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