Cybersécurité : des données confidentielles d’enquêtes en ligne

Alors que des informations critiques sur des enquêtes téléphoniques circulent librement sur Internet, Rémi Tassing interpelle l’ANTIC et les autorités sur les risques de cette exposition numérique.
Le développeur camerounais Remi Tassing, fondateur de la plateforme Katika, a lancé ce 7 mai 2024 une alerte concernant la fuite récurrente de documents confidentiels émis dans le cadre d’enquêtes judiciaires. Dans une série de publications sur son compte X, il dénonce la présence de ces données ultrasensibles sur des plateformes publiques, notamment Scribd, sans aucune mesure de sécurité. « Vous savez, quand la police ou la justice effectue une réquisition téléphonique, cela donne accès à des données très confidentielles ; numéros, identités, CNI,IMSI (International Mobile Subscriber Identity), IMEI (International Mobile Equipment Identity), et même les localisations des téléphones quand les appels et SMS sont lancés; ces données ne doivent en aucun cas se retrouver dans le domaine public », explique-t-il.
Il évoque un cas découvert en 2021 sur un document de 188 pages contenant l’ensemble des communications d’un individu sur une période de six mois dans une localité de Bamenda. Ce document, qui mentionne tous les appels et messages reçus ou envoyés, avec des détails comme l’émetteur, le destinataire, la durée des communications, les localisations GPS et les identifiants télécoms (IMSI, IMEI), est toujours accessible en ligne aujourd’hui.
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Des plateformes pro-gouvernementales
Contacté par l’équipe de Télé’Asu il a confié avoir retrouvé ce fichier sur “My Country People”, un site qu’il qualifie de pro-gouvernemental, utilisé selon lui à l’époque pour contrer la propagande des séparatistes anglophones. Remi Tassing s’indigne que des entités censées protéger ce type d’information comme l’ANTIC (Agence Nationale des Technologies de l’Information et de la Communication) ou le MINDEF (Ministère de la Défense) traitent avec une telle négligence ces documents confidentiels. « Ce sont des informations qu’on ne devrait jamais voir circuler ; elles peuvent facilement être exploitées pour du SIM cloning, des escroqueries ou d’autres cyberattaques ; c’est choquant de voir ça mis en ligne sans aucune restriction », insiste-t-il.
Des alertes ignorées par les autorités
Malgré de nombreuses interpellations publiques adressées à l’ANTIC, au MINDEF ainsi qu’à la ministre des Postes et Télécommunications Libom Li Likeng, le développeur indique n’avoir obtenu aucune réaction officielle. « Je sors de mon silence parce que de plus en plus de ces documents refont surface sur Internet, en toute impunité ; certains portent même les logos de la police ou de la gendarmerie ; cela prouve une négligence inacceptable », déclare-t-il.
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Dans une dernière alerte adressée directement à l’ANTIC, il a écrit : « Antic Cameroun, votre temps est écoulé ! Voici un cas grave que j’ai découvert il y a quatre ans ; je ne l’avais pas rendu public à l’époque en raison de la sensibilité des données. Mais aujourd’hui, je constate que la situation ne fait qu’empirer ». Remi Tassing appelle les autorités à prendre conscience de la gravité de ces fuites et à mettre rapidement en place des mécanismes de contrôle et de sécurisation de ces documents. Car selon lui, laisser ces informations circuler librement, c’est non seulement violer la vie privée des citoyens, mais aussi compromettre la sécurité nationale.
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